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Louis Charbonneau
UQAM

 

 

Inde

  • La généalogie de notre système de numération

Karl Menninger, Number Words and Number Symbols, A Cultural History of Numbers, Cambridge, Mass. : MIT Press, 1977, p. 418.

 

La trigonométrie en Inde

  • Époques concernées

    La période de Kushan (1er siècle de notre ère) et des Gupta (4-6e siècles).

  • Influence en ce qui a trait à la trigonométrie et l'astronomie : principalement Hipparque.

  • Premier ouvrage : Paitamahasiddhanta (5e siècle)

    • On y retrouve une table de demis-cordes plutôt qu'une table de cordes (Voir problème 2 de Ptolémée)
    • Table basée sur un cercle de rayon 3438, comme Hipparque.
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  • Le Aryabhatiya d'Aryabhata (466-550)

      • Écrit en 499, alors que l'auteur a 33 ans.
      • Il écrit souvent simplement Jya ou Jiva au lieu de jya-ardha (corde-demi)
      • 33 énoncés mathématiques sur 123 dans le livre.
      • Calcul de la table, par sauts de 3°45'.

         

        Stenza I-10 Les vingt-quatre demi-arc [différences] calculées en minutes d'arc sont 225, 224, 222, 219, 215, 210, 205, 199, 191, 183, 174, 164, 154, 143, 131, 119, 106, 93, 79, 65, 51, 37, 22, 7

        Stenza II-12 De combien la deuxième [différence des ] sinus est moins que le premier et par le quotient obtenu en divisant la somme des [différences] des sinus précédentes par le premier sinus, par la somme de ces deux quantités la [différence] des sinus suivants sont moins que le premier sinus.

        Formule sous-jacente à ce dernier énoncé :

        sn = sn-1 + (s1 - (s1 + ... + sn-1)/s1)

        On peut penser que les tables ont été calculées un peu comme celle d'Hipparque et que cette méthode en a été déduite. On peut retrouver ce genre de formule en remarquant que la seconde différence est proportionnelle à la valeur du sinus (coefficient de proportionnalité : 225, le s1. En effet, on a alors d2si = si/s1. Or dsn-1 = s1 - d2s1 - d2s2 - ... - d2sn-1, en remarquant que ds1 = s1.

    • Remarquez l'approche purement numérique
    • Le sinus est vu ici, et jusqu'au début XVIIe siècle, d'abord comme un segment dans un cercle.
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  • Origine du mot sinus

    Aryabhata écrit souvent simplement Jya ou Jiva au lieu de jya-ardha (corde-demi). Lorsque les Arabes traduiront les textes indiens, il utiliseront à nouveau le terme indien courant Jiva, qui ne veut par ailleurs rien dire en arabe. Toutefois, en arabe, on n'écrit souvent que les consonnes. Dès lors, le mot Jiva va s,écrire Jb et sera lu plutôt comme Jaïb, qui signifie poitrine ou col. Lors de la traduction en latin des livres arabes, les Européens emploieront le mot sinus qui veut précisément dire poitrine, col, ou baie. On rencontre le mot Sinus sur les cartes géographiques de la Renaissance et du XVIIe siècle pour les baies (Sinus Mexicanus par exemple sur des globes terrestres anciens du Musée Stewart de l'Ile St-Hélène)

  • Tables de sinus et cosinus (demi-corde perpendiculaire)

    • Par Varahamihira (6e siècle)
    • Dans le Surya-siddhanta (7e siècle)
      • Indice de l'utilisation de la sécante (1/ccos) et de la tangente (sin/cos) dans l'étude des ombres.
      • Les tables ne deviennent pas plus précises jusqu'au 12e siècle, donc besoin d'approximations

  • L'importance des tables de sinus dans l'histoire de la numération indienne

    (B.L. van der Waerden, Science Awakening, New York : Oxford Un. Press, 1961, pp. 53-58.)

    L'invention de la numération positionnelle indienne date probablement de vers 600. D'abord utilisée par les astronomes puis, après de nombreuses années, par les gens ordinaires.

    Les nombres poétiques : la mémorisation des tables de sinus.

    Vers 500, pour apprendre les tables de sinus, les astronomes associaient à chaque chiffre un mot qui le rappelait (ex. 1 : lune, bouche; 2: ailes, oreilles, yeux; 0: trou; etc.) de façon à transformer les tables en poèmes rimés. On rencontre cela dans le Surya-siddhanta (7e siècle) mentionné ci-dessus.

    Aryabhata avait développé un système de syllabes qui exprimait à la fois les chiffres et l'ordre de grandeur de ce dernier (ex. ca voulait dire 6 unités (le a indiquant les unités ou les dizaines, le c signifiant 6), gi signifie 3 centaines (g: 3, i: centaines) etc.)
    ainsi cayagiyinusuchlr signifie 63335775 (du plus petit au plus grand de gauche à droite), pour nous : 57753336.

    Son disciple Bhaskara simplifie en enlevant les lettres pour les ordres de grandeurs. Il utilise un zéro. C'est un système positionnel.

 

  • Méthodes d'approximation

    • Brahmagupta (598-670), vers 650
      • Pour trouver le sinus d'un angle x, on détermine d'abord la valeur d'un angle xi inférieur à x, qui est dans la table et le plus proche de x. Si Di est la ième différence (voir la Stenza I-10 plus haut) et si on note h comme étant les sauts de la table (3° 45'), Brahmagupta utilise la règle suivante :

      sin(x) = sin(xi +e) = sin(xi) + (e/2h)(Di + Di+1) + (e2/2h2)(Di - Di+1).

      • Cette règle est donnée sans preuve.
      • Appliquée à x = 20° (e = 1° 1/4, xi = 18°3/4, donc i = 5, D5 = 215° et D6 = 210°) on obtient sin(20°) = 1176. (En réalité 1175,87)

       

    • Bhaskara (600-680 ??)
      • Sa règle est la suivante :

      Rsin(x) = (4Rx(180°-x))/(40 500 - x(180° - x))

      • Si x = 20°, Rsin(20°) = 1180 alors que le calcul plus exact donne 1179,80.
      • D'où vient cette règle ? (Hypothèse)
        • La fonction quadratique P(x) = Rx(180°-x)/8100 a les même valeurs que Rsin(x) pour x = 0°, 90° et 180°.
        • Ajustons-la pour que ce soit le cas pour 30° aussi.

        Rsin(30°) = R/2 alors que P(30°) = (5/9)R.
        Peut-être ont-ils eu l'idée de coincer le sinus entre P(x) et P(x)sin(x), car alors, à x = 30°, on a

        (P(x) - Rsin(x))/(Rsin(x) - P(x)sin9x)) = 1/4

        d'où on tire que Rsin(x) = 4P(x)/5-(P(x)/R) qui est de fait la règle de Bhaskara.

    • Ces règles et leur utilisation plutôt que la recherche de tables plus précises, montre l'importance de la tradition dans l'usage des modes de calculs.
    • Cela me fait aussi penser à Ramanujan (1887-1920), le génial calculateur ami de Hardy.
    • Illustre aussi ce qui se passe lorsqu'il n'y a pas de recherche systématique de démonstrations.

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